La vie rêvée de Gainsbourg
Séducteur, poète, provocateur, insoumis, créateur de génie, Serge Gainsbourg était tout cela à la fois Un personnage complexe et tourmenté passé à la postérité, autant pour ses frasques que pour ses chansons. C'est dire si le film « Gainsbourg, une vie héroïque » est attendu.
C'est la mode des « biopics » au cinéma, mais l'originalité de cet ambitieux projet de Joann Sfar réside justement dans son refus de n'être qu'une simple biographie filmée. Le réalisateur n'a pas totalement abandonné son monde de la bande dessinée. Avec sa sensibilité et son onirisme. Ce qui lui permet notamment d'introduire, dans ce film de plus de deux heures, un obsédant « Gainsbarre », un personnage caricatural incarnant le double maléfique de Gainsbourg. Comme un ange du mal toujours juché sur son épaule.
Avant d'aborder le Gainsbourg artiste, Joann Sfar nous invite à découvrir un Gainsbourg méconnu, le Gainsbourg enfant pendant la Seconde Guerre mondiale. Un gamin soucieux de son étoile jaune ! Quand l'un des personnages lui demande « Pourquoi es-tu si pressé de porter ton étoile », l'enfant répond : « C'est votre étoile Monsieur. C'est vous qui souhaitez que je la porte »... Sans doute le passage le plus intense du film.
Anna Mouglalis, femme fatale...
Dans cette oeuvre, soutenue par une bande son reprenant les grands succès de l'artiste, Eric Elmosnino endosse le costume de Gainsbourg avec une certaine allure. Un vrai rôle casse-gueule pourtant. Mais cet acteur de théâtre, quasi-inconnu au grand écran, restitue avec justesse ce doute qui, en permanence habitait l'artiste. Elmosnino joue avec finesse sur la sensibilité de son personnage. Et il offre par ailleurs un Gainsbourg crédible par sa gestuelle, la tonalité de sa voix, sa façon de scinder les phrases.
Les nombreuses femmes de Gainsbourg permettent un défilé de quelques pointures du box-office. Avec un effet très contrasté. La belle Anna Mouglalis incarne à la perfection l'idée que nous pouvons nous faire d'une Juliette Gréco, femme fatale. A contrario, Sara Forestier n'est pas une seconde crédible en incarnant cette France Gall, totalement potiche. Trop triste, trop fade. Et Laetitia Casta nous donne une idée assez précise d'une torride Brigitte Bardot. Et l'on reste ému devant Lucy Gordon en Jane Birkin. Lucy s'est suicidée en mai dernier....
Alors au final, qu'en dire? Emouvant hommage ou film sacrilège ? Peut-être un peu des deux.